Nouvelles fouilles de la tombe de la Princesse de Vix

En haut : Fouilles de Lavau (©Gliksman D., INRAP) et en bas : Vue du Mont Lassois (©Goguey R.)

Aujourd'hui, j'ai décidé de vous parler d'un petit sujet d'actualité pour changer un peu (et aussi que je n'ai pas eu le temps de visiter de nouveaux musées ou expositions temporaires). Donc pour cet article, j'ai décidé d'évoquer les nouvelles fouilles qui auront lieues en contrebas du Mont Lassois, à côté de Châtillon-sur-Seine (21), là où se trouvait la tombe de la célèbre "Dame de Vix", découverte en 1953. Ces fouilles ont commencées le 19 août et se termineront normalement le 30 novembre 2019. Elles sont dirigées par l'INRAP, notamment par Bastien Dubuis que je reciterai plus tard, l'UMR 6298 ArTeHis (CNRS/Université de Bourgogne) avec le soutien de la DRAC Bourgogne-Franche-Comté et la Communauté de Communes du Pays Châtillonais.
Mais alors pourquoi rouvrir une ancienne fouille vieille de plus de 60 ans ? Premièremeent parce que les techniques et technologie en archéologie ont évoluées mais aussi à la lumière de découverte plus récentes comme la tombe du "Prince de Lavau" en 2014 à côté de Troyes (10).
Je vais maintenant vous parler de ces deux "tombes princières".

Une reconstitution de la tombe de la " Dame de Vix "

Je vais commencer par la découverte la plus ancienne des deux qu'est celle de la "Dame de Vix". Comme je l'ai dit plus haut elle fut découverte en 1953 par Réné Joffroy. Avant de vous parler de la tombe en elle-même, je vais préciser que le Mont Lassois a connu, depuis 2001, de nombreuses campagnes de fouilles, aussi bien sur le plateau qu'au niveau des pentes, dans le cadre d'un Programme Collectif de Recherches (P.C.R.) intitulé " Vix et son environnement ". Mais les fouilles les plus anciennes datent de 1930. Les fouilles les plus récentes se sont surtout intéressées à l'urbanisme et à l'architecture des structures sur le plateau et notamment aux éléments de fortifications mais également des nécropoles dans la plaine en contrebas du Mont Lassois dans une desquelles se trouvent la tombe de la " Dame de Vix " (au lieu-dit " Lochères ").
Mais pourquoi cette tombe est-elle si particulière à tel point qu'on parle de tombe princière ? Première chose il s'agit d'une tombe à char (à quatre roues) sur lequel reposait une personne de sexe féminin parée de nombreux bijoux dont un torque en or présentant de pégases, mais il y avait aussi un torque en bronze, huit fibules, trois bracelets en pierre noire (lignite) et un bracelet en bronze orné de perles en ambre sur chaque bras et deux anneaux de cheville en bronze.
Avec ce véhicule on va trouver d'autres éléments dont des objets liés au banquet provenant de territoires méditerranéens : deux coupes en terre cuite d'Athènes, une œnochoé et trois bassins en bronze étrusques, une phiale en argent de fabrication locale  (la seule exception de ce service à vaisselle) et le grand cratère en bronze originaire de Grande Grèce (Sud de l'Italie actuelle). Ce matériel exceptionnel par sa richesse et sa provenance permet de dater la tombe vers 500 avant Jésus Christ (soit plus ou moins la fin du Premier Âge du Fer ou période de Hallstatt, soit le début du Second Âge du Fer ou période de La Tène).
En plus du matériel le tout se situait dans une chambre funéraire de 9m² localisée au centre d'un tumulus de 38m de diamètre et une hauteur actuelle de 1m (donc il était plus haut du temps de son élévation).
Les éléments de cette tombe sont aujourd'hui présentés dans les collections du musée du Pays Châtillonais -Trésor de Vix.

Votre humble serviteur à côté du cratère et le torque en de la " Princesse"

 Détails du cratère (Gorgone et représentation féminine) et du torque (Pégase)

Pour la tombe de Lavau, la découverte est toute récente puisqu'elle résulte d'une fouille préventive dirigée par l'INRAP, dont l'équipe était supervisée par Bastien Dubuis, le revoilà, dans la région de Troyes (10) entre le 14 octobre 2014 et le 13 avril 2015. La tombe princière faisait partie d'un complexe funéraire qui devait être visible depuis la Seine au Vème avant J.-C. et tout comme celui de la " Dame ", la hauteur conservée du tumulus qui accueillait la chambre funéraire ne dépassait pas 1m à notre époque. Alors pour les comparaisons on va y retrouver la présence d'un char, mais ici à deux roues seulement, de la vaisselle liée au banquet : une œnochoé en terre cuite d'origine athénienne, une en bronze venant d'Étrurie, une passoire et une cuillère perforée en argent doré.  Mais la pièce la plus impressionnante est un chaudron en bronze d'un peu plus d'1m de diamètre avec les attaches d'anses ornées de tête d'un dieu-fleuve grec (Achéloos) mais aussi sur la lèvre du contenant des têtes de félins (lionnes ?). Ce récipient proviendrait de la région italique soit l'Étrurie soit la Grande Grèce.
On note aussi la présence de parure avec notamment un torque en or orné de griffons et deux bracelets dans la même matière décorés de têtes d'oiseaux aquatiques opposés. Il y avait aussi un peu d'armement avec des éléments appartenant à un couvre-chef/casque d'apparat et via un couteau et son fourreau.
Pour l'instant, la tombe n'est pas encore présentée mais certains des objets ont été exposés dans le cadre de l'exposition ArkéAube et ils devraient l'être au musée Saint-Loup (Troyes, 10).

 Vue du torque et des bracelets en or du " Prince " de Lavau avec détail sur un griffon du torque

 Détail d'un des bracelets et la cuillère perforée du " Prince " de Lavau

Alors ces deux exemples se démarquent du reste des tombes à char puisque même si c'est un phénomène important dans certaines régions (autour de Troyes et donc de Lavau notamment), il ne s'agit pas de la grande majorité des tombes pour ces périodes et ce n'est pas un phénomène connu uniquement sur le territoire français comme le prouve les tertres des région de la Heuneburg et d'Asperg en Allemagne avec notamment la magnifique tombe de Hochdorf. Dans celle-ci en plus du char à quatre roues, on y trouvait une kliné (une sorte de banc pour le banquet) en bronze doré orné de représentations de danses/combats ritualisés, neuf cornes à boire (huit en corne d'aurochs et une en fer, toutes recouvertes de feuilles d'or), de la vaisselle en bronze et en terre cuite d'origine méditerranéenne mais aussi un grand cratère en bronze d'une contenance d'environ 500L décoré de trois lions (dont deux originaux de Grande Grèce et un de fabrication locale).


Quelques sources pour aller plus loin :
Bibliographie :
- CHAUME B. (2011) - Vix (Côte-d'Or), une résidence princière au temps de la splendeur d'Athènes, Archéologie en Bourgogne, n°24, s. n., 18 p.
- DUBUIS B. (2017) - Chronique d'une découverte exceptionnelle. La nécropole et la tombe " princière " de Lavau  , La Vie en Champagne, n°89, s. n., p .2-23
- FOUGERE F. (2016) - La tombe de Vix. Un trésor celte entre Histoire et Légende, Fage éditions, 104 p.
s. n. (2018) - Archéologie dans l'Aube. Des premiers paysans au prince de Lavau, 5300-450 avant notre ère, catalogue de l'exposition ArkéAube, Snoeck, 543 p.
- s. n. (2018) - ArkéAube. Des premiers paysans au prince de Lavau, 5300 à 450 avant J.-C., Archeologia, Hors série n°21, Faton, 65 p.
- s. n. (2003) - Autour de la Dame de Vix, Celtes, Grecs et Étrusques, catalogue de l'exposition éponyme, Éditions du Musée du Châtillonais, 134 p.

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